Quand on décide de faire un ravin et que la route d’accès est fermée, on en fait un alternatif. Alors voilà comment a commencé cette nouvelle journée de canyon hivernale avec Renaud. Enfin, pas tout à fait, puisque pour moi ça avait commencé avec un bon torticolis au réveil. Couplé avec une tendinite à l’épaule, ça commence à faire pas mal de handicaps. Qu’importe, le ravin de Saint Martin doit bien valoir quelques douleurs et désagréments. Sauf que la route de Bairols est fermée pour cause de purge. Ben ouais, il y a de l’eau dans les canyons mais ils sont inaccessibles. Alors on fait quoi ? On change de ravin pardi !
Et c’est finalement dans le ravin de Gilette, dans le bas des gorges du Cians que nous déboulons avec nos cordes, casques et autres baudriers, une marche d’approche un peu plus longue que prévue mais fort agréable plus loin. A ce point du récit, il me parait important d’écrire une petite remarque personnelle à cette charmante jeune femme que je ne connais pas mais qui semblait me connaître : « Tu dois être championne du monde de trail pour avoir fait cette montée en 20 ou 30 minutes, nous on a mis pas loin d’une heure et encore, on n’a pas fait semblant de marcher ! Merci par contre pour l’idée, on a bien apprécié le canyon. » Fin de la remarque.
Je disais donc, nous arrivons au départ du ravin de Gilette et là, drame cosmique : point d’eau !!! Est-ce que quelqu’un a déjà vu le haut de ce canyon couler ?? Et là, en une simple fraction de seconde, je me revois exulter non sans fierté complètement déplacée à tous ceux qui me parlaient de canyons secs : « Si j’ai envie de faire du rappel, je vais dans le Verdon. Au moins je m’amuse pour remonter ! ». Je regarde Renaud, des larmes plein les yeux et lui demande : « On ne peut pas faire ça, non ? » A cet instant précis, les éléments étant sûrement émus par tant de tristesse dans cette question fondamentale, je reçois une goutte sur le bras. Et voilà qu’il se met à pleuvoir ! Et Renaud qui me répond : « Voilà, il est mouillé ton canyon ! » Mon honneur sauf, nous nous engageons donc heureux dans ce canyon mouillé.
Mais restons honnêtes, seuls les nuages ont participé à rendre humides les rochers. Parce que de rivière, nous n’en n’avons vu goutte jusqu’à la moitié du canyon. Alors je confirme mon impression : les rappels, c’est fun, mais sans eau, ça perd énormément de saveur. Cependant, nous évoluons dans un décor impressionnant, le royaume de la strate. Attention, rocher péteux ! Quelques encaissements sont assez improbables.
Quand enfin on entend de l’eau couler, je commençais à me dire que je me trimballais les combis dans le sac pour rien. Plein de mauvaise foi, je me dis que ce doit être un filet d’eau qui se perd entre les galets au bout de 2m. Et bien non, mesdames et messieurs ! Coup de théâtre, une résurgence sortie de nulle part, ou plutôt sortie de la montagne alimente le cours d’eau abondamment ! Ainsi que plein d’autre tout au long de la descente jusqu’à donner un débit correct suivant la définition du site internet de référence en la matière que tout le monde connait. Ô joie ! Enfin un peu d’action !
La suite du canyon est beaucoup plus sympa. Les ronces se changent en mousses et certains bassins donnent de l’eau à mi-cuisse. Le haut de la combi n’est peut-être pas obligatoire mais tout de même apprécié sous certaines cascades un peu arrosées, et notamment, la superbe C55 finale, un goulet magnifiquement sculpté alimenté par deux affluents à des hauteurs différentes, aboutissant sur une C22 ouverte sur un grand cirque. Vraiment très classe. A elle seule, cette cascade fait l’unanimité de notre groupe de deux : nous ne sommes pas déçus.
Le temps d’aller nous laver dans le Cians, nous nous faisons attraper par le propriétaire de la ferme truiticole qui nous explique qu’il ne faut pas patauger dans les launes parce que ça pourrit l’eau pour ses poissons. Et nous de nous excuser et de lui expliquer que nous avons suivi les instructions : sortie rive droite avant la dernière étroiture. Mais apparemment ça n’a pas suffi. Peut-être que finalement, ce canyon n’est pas à faire avec ce genre de débit… En tout cas, ce monsieur a été plutôt gentil (il n’avait même pas de fusil à la main) et nous ne saurons que vous conseiller de faire très attention à marcher dans l’eau le moins possible après la C22 et éviter les ruisseaux sur la marche de retour. Et pourquoi pas acheter quelques truites après vous être changés ?
Enfin, toutes ces aventures terminées, il reste que nous n’avons pas encore vu de nos propres yeux le ravin de Saint Martin. Un prochain article ?